La gendarmerie nationale constitue l’une des principales forces de sécurité publique en France. Cette force armée à statut militaire assure des missions de police sur l’ensemble du territoire national, avec une compétence particulière dans les zones rurales, périurbaines et sur les voies de communication. Son organisation, historiquement calquée sur le découpage territorial français, a évolué pour s’adapter aux réformes administratives récentes tout en conservant sa structure hiérarchique militaire.
Organisation hiérarchique générale
Direction et administration centrale
La gendarmerie nationale s’organise autour de la Direction générale de la Gendarmerie nationale (DGGN), qui constitue l’échelon central de commandement. Contrairement à d’autres institutions, la gendarmerie départementale ne dispose pas de direction spécifique au sein de la DGGN. Les missions de sécurité publique, sécurité routière, police judiciaire et anticipation opérationnelle sont réparties entre des sous-directions fonctionnelles rattachées à la Direction des opérations et de l’emploi.
L’Inspection générale de la gendarmerie nationale complète ce dispositif central en assurant le contrôle interne et la déontologie de l’institution. Directement rattachée au directeur général, elle enquête sur les infractions internes et veille au respect des procédures.
Échelons territoriaux
L’organisation territoriale de la gendarmerie suit une structure hiérarchique claire, adaptée depuis 2016 aux nouvelles régions administratives françaises. Chaque région administrative française dispose d’une région de gendarmerie correspondante, dirigée par un commandant de région directement subordonné au directeur général.
Le groupement de gendarmerie départementale représente l’échelon du département. Créé en 1958, il était autrefois appelé « compagnie de gendarmerie départementale ». Chaque groupement est structuré en compagnies qui correspondent à l’échelon de l’arrondissement, anciennement nommées « sections ».
La gendarmerie départementale – cœur du dispositif territorial
Missions et rôle principal
La gendarmerie départementale constitue le cœur du dispositif territorial avec environ 3 600 brigades réparties sur l’ensemble du territoire national. Elle assure trois types de missions fondamentales : les missions de police judiciaire incluant la constatation d’infractions, les enquêtes et les interpellations ; les missions de police administrative comprenant le maintien de l’ordre, l’assistance aux populations, la circulation et la protection de l’environnement ; enfin, les missions militaires englobant le renseignement, le soutien aux opérations armées et le contrôle des armements nucléaires.
Cette force est présente dans 95% du territoire français et maintient un contact direct avec la population à travers ses brigades territoriales. Chaque brigade assume la responsabilité sécuritaire d’une ou plusieurs communes, selon une logique de proximité qui peut organiser les unités en communautés de brigades ou en brigades autonomes.
Structure organisationnelle
Un groupement départemental type, comme celui des Alpes-de-Haute-Provence basé à Digne-les-Bains, comprend quatre compagnies territoriales implantées dans les principales villes du département. Dans le cas des Alpes-de-Haute-Provence, ces compagnies sont situées à Digne-les-Bains, Forcalquier, Barcelonnette et Castellane. L’effectif théorique d’un tel groupement atteint 425 personnels, incluant officiers, sous-officiers, gendarmes adjoints volontaires et personnels civils, répartis dans 42 unités sur 32 sites départementaux.
Le réseau des brigades territoriales se compose de différents types d’unités : 4 brigades territoriales autonomes, 12 brigades chef-lieu de communautés et 12 brigades de proximité. Cette organisation permet une couverture optimale du territoire tout en maintenant la flexibilité nécessaire aux interventions.
Les unités spécialisées intégrées
Sécurité routière
La sécurité routière constitue une mission prioritaire confiée à des unités spécialisées au sein de chaque groupement. L’escadron départemental de sécurité routière (EDSR) coordonne cette mission avec ses pelotons motorisés et ses brigades motorisées. Dans les Alpes-de-Haute-Provence, cette organisation comprend un peloton motorisé basé à Peyruis et deux brigades motorisées implantées à Digne-les-Bains et Manosque.
Unités d’investigation et de recherche
Chaque groupement dispose d’unités spécialisées dans l’investigation judiciaire. Les brigades de recherches, présentes dans chaque compagnie, se consacrent exclusivement à la police judiciaire et prennent en charge les enquêtes complexes ou techniquement exigeantes. Elles épaulent les brigades de proximité et disposent de moyens techniques avancés.
La brigade départementale de renseignements et d’investigations judiciaires complète ce dispositif, tandis que les groupes d’investigation cynophile apportent leur expertise technique spécialisée. Le département de l’Ain compte ainsi 5 techniciens en investigations criminelles et environ 150 techniciens d’investigation criminelle de proximité.
Unités d’intervention et de surveillance
Les pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) constituent une composante essentielle de chaque compagnie. Ces unités interviennent lors d’événements importants en appui des brigades locales, avec une priorité accordée à la lutte contre la délinquance d’appropriation sur la voie publique. Dans les Alpes-de-Haute-Provence, les PSIG sont implantés à Castellane, Château-Arnoux-Saint-Auban, Jausiers et Volx.
Certains groupements disposent également d’unités hautement spécialisées comme les pelotons spécialisés de protection de la gendarmerie (PSPG), affectés à la sécurité des sites nucléaires. Le groupement de l’Ain comprend ainsi un PSPG dédié à la protection du centre nucléaire de production d’électricité du Bugey à Saint-Vulbas.
Innovations territoriales
Les brigades territoriales mobiles (BTM) représentent une innovation récente dans l’organisation territoriale. Ces unités répondent aux enjeux contemporains comme les flux migratoires, les trafics transfrontaliers et la criminalité itinérante. Le département de l’Ain expérimente cette approche avec deux BTM opérationnelles à Thoiry et Montluel, et une troisième prévue à Nantua. Ces unités tiennent compte de l’attractivité des métropoles voisines comme Genève et Lyon, sources de pression sécuritaire spécifique.
Les autres composantes de la gendarmerie
Gendarmerie mobile
La gendarmerie mobile regroupe environ 13 000 militaires spécialisés dans le maintien et le rétablissement de l’ordre public. Organisée en 109 escadrons de 110 gendarmes chacun, elle intervient en renfort des unités départementales lors d’événements majeurs. Cette force, surnommée « la jaune » en raison de ses insignes dorés, intègre également le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et ses antennes provinciales pour les interventions à haut risque.
Garde républicaine
La Garde républicaine assume les missions de sécurité et de services d’honneur pour les hautes autorités de l’État. Composée d’environ 2 850 militaires répartis en deux régiments d’infanterie, un régiment de cavalerie et des formations musicales, elle assure la protection de l’Élysée, Matignon, l’Assemblée nationale et le Sénat. Ses missions s’étendent à la sûreté, la coopération internationale et le rayonnement culturel de la France.
Gendarmeries spécialisées
Les formations spécialisées répondent à des besoins spécifiques selon les domaines d’intervention. La gendarmerie maritime protège les intérêts maritimes français en tant que force opérationnelle de la Marine nationale. La gendarmerie de l’air assure la police administrative, militaire et judiciaire dans les bases aériennes militaires. La gendarmerie des transports aériens sécurise l’aviation civile sous contrôle de la Direction générale de l’aviation civile.
D’autres unités hautement spécialisées complètent ce dispositif : la gendarmerie de l’armement veille au respect des procédures de secret défense, tandis que la gendarmerie de la sécurité des armements nucléaires assure la protection de ces installations stratégiques.
Réserve opérationnelle
La réserve opérationnelle renforce les unités d’active avec 141 réservistes dans un groupement type comme celui des Alpes-de-Haute-Provence. Cette force se compose de deux tiers de volontaires issus de la société civile et d’un tiers d’anciens militaires d’active. Le recrutement s’effectue de 17 à 40 ans après tests de sélection et formation militaire. Les réservistes participent à la sûreté publique, la protection des biens et des personnes, le renseignement et l’assistance aux populations.
Évolutions récentes de l’organisation
Adaptation à la réforme territoriale
La réorganisation territoriale de 2016, qui a réduit le nombre de régions métropolitaines de 22 à 13, a entraîné une adaptation majeure de la structure de la gendarmerie. Durant la période de transition 2016-2022, les anciennes régions ont été maintenues comme formations administratives avant leur fusion complète. La région Normandie a été fusionnée le 1er août 2020, suivie par les autres régions le 1er septembre 2022.
Cette réforme a également conduit à la redéfinition des zones de sécurité Sud et Sud-Ouest pour tenir compte du nouveau découpage de la région Occitanie. Les commandements régionaux ont été réorganisés selon ces nouvelles circonscriptions administratives.
Modernisation des moyens
L’organisation contemporaine intègre des innovations technologiques et organisationnelles. Les sections des systèmes d’information et de communication modernisent les outils de travail, tandis que les cellules d’identification criminelle et d’appui judiciaire renforcent les capacités d’investigation.
Les brigades de prévention de la délinquance juvénile et les cellules de prévention technique de la malveillance témoignent d’une approche préventive adaptée aux enjeux sociétaux actuels. Cette évolution s’accompagne du développement de partenariats avec d’autres forces de sécurité, notamment la Police nationale dans le cadre d’interventions en zone de compétence partagée sur décision judiciaire.
Défis contemporains
L’organisation actuelle de la gendarmerie répond aux défis sécuritaires du XXIe siècle. La lutte contre le terrorisme, le renseignement opérationnel et la protection des infrastructures critiques mobilisent des unités spécialisées. Le Bureau de la lutte anti-terroriste et la Sous-direction de l’anticipation opérationnelle coordonnent ces missions sensibles.
La présence outre-mer, avec 4 300 militaires dans les territoires d’outre-mer depuis 1716, et les 293 militaires affectés dans 94 ambassades et consulats illustrent la dimension internationale de cette organisation. Le Groupement des opérations extérieures coordonne les missions à l’étranger dans le cadre de la Force de gendarmerie européenne.
Cette organisation complexe et adaptative permet à la gendarmerie nationale de remplir ses missions de sécurité publique tout en conservant sa spécificité militaire et sa capacité d’intervention sur l’ensemble du territoire national et au-delà.